Bastien aux You Essais

4 jours après avoir appris que je dois aller à New York pour le boulot, me voilà dans l’avion pour la première fois depuis des années, excité comme un gamin de voir le paysage façon Playmobil défiler par le hublot.

Mon siège est côté allée, et 97% des gens qui ont un hublot ferment le volet dès qu’ils arrivent à leur place et commencent à regarder un film. Pendant tout le vol, je n’ai jamais vu plus de 4 volets ouverts en même temps. Heureusement que je suis de bonne humeur, parce qu’il y a des baffes qui se perdent, quand même…

Nouille-Orques

Après 2 jours de rendez vous avec le MET, je suis libre! J’ai déjà plein de conseils de trucs à faire: cinéma en plein air à Bryant park, surf à Rockaway beach, Ferry de Staten Island, etc…

Purée, y’a pas de répit, nulle part… les prix ne sont jamais affichés, ou alors sans TVA, à laquelle il faut rajouter les tips. La navette de l’aéroport est gratuite, mais il faut payer pour sortir. Le stand de hot dog à 4$, faut un tip. Les chiottes du restau sont gratuites, mais avec un tip. Les vélibs sont à 25 balles la journée. Pour entrer dans un bar, faut raquer. Pour s’asseoir au restau, faut raquer. Pour avoir du pain… faut rêver 🙂

Ceci n’est pas une boulangerie

Mais bon, petitapeti j’apprends des trucs, et ça va mieux.. En règle générale, il faut s’éloigner des habitudes des touristes. Par exemple l’autre jour j’étais à Trader Joes, un supermarché pas trop cher, et apparemment bien vu de ses employés et fournisseurs… eh ben j’y ai pas vu un seul français, et maintenant j’ai mes repas pour les 3 prochains jours pour le prix de 2 hot dogs. Par contre, deux trucs à éviter : la salade en sachet (pré-pourrie) et le « string cheese ». J’en avais entendu parler dans des films, et c’est ignoble : Je me suis forcé à finir ma portion, et refilé le reste à la dame de l’hôtel (absolument ravie). Peu de touristes également au lavomatic, du coup on profite de prix raisonnables, et d’une tenancière plus vraie que nature, avec son caractère sans filtre. C’est pas ici qu’on va trouver des faux-sourires préfabriqués façon Starbucks.

Le seul moyen de transport valable à NYC, c’est le métro. Et là pour le coup, c’est une bonne affaire : 30$ pour une carte illimitée sur 7 jours. Après quelques jours, je finis par comprendre à peu près comment ça marche. Par contre, attention à l’excès de confiance: dès que tu commences à penser « oh ben c’est facile, au final », tu te retrouves en Floride.

Certaines lignes passent à un quai différent dans la soirée. C’est indiqué nulle part, sur les écrans c’est que des pubs, et y’a personne sur le quai. En fait, il fallait regarder l’app (non disponible sur mon tel), tout simplement. En alternative, y’a le taxi… ça coûte un bras, c’est impossible d’en trouver un, ça met des heures et c’est terrifiant.

Un petit air de “Voyage de Chihiro”…

Balade dans le Bronx

Pas mal plus propre que downtown à certains endroits, mais beaucoup plus crade à d’autres : La crasse Bronxienne a un instinct grégaire plus développé que celle de Manhattan. Les enfants qui jouent dans l’eau des bouches à incendie, c’est pas un mythe ! C’est un peu Paris-Plage version New-York : Les parents prennent le soleil en arc-de-cercle autour de la glacière, assis sur leurs sièges de camping, pendant que les enfants jouent dans l’eau. Sur les terrains de basket du parc, Je m’attendais à voir des prodiges, mais au final ils sont pas tellement meilleurs qu’au parc Éole… Dans une rue calme, je croise une voiture, genre BM ou Mercedes, avec plein de néons partout, et le pare-brise décoré de cette phrase : « Don’t hate, get $$ »

Messe gospel dans Harlem

Je me suis habillé propre pour ne pas passer pour un touriste : pantalon long, belle chemise, et chaussures fermées, car apparemment il y a un tri à l’entrée, et on envoie les touristes au balcon… Je sais pas si c’est ma couleur, celle de ma chemise ou mon léger retard, mais je me fais repérer direct et envoyer au balcon. Dès que j’ai le cul posé, un mec en blanc vient me voir et me tend une corbeille pleine de billets : C’est 20 balles. J’essaie de scruter son regard pour savoir s’il s’agit d’une suggestion, mais on dirait pas. Le pasteur est en plein sermon, et c’est hyper fort. Tellement fort qu’on comprend pas un mot à part « amen », « brother » et « sister ». Au bout d’un moment, le batteur entre en scène, l’orgue entame une mélodie, et le chœur se lève pour chanter quelques gospels très cools. Même les touristes dansent un peu !

Le dernier chant se termine, on se calme, l’ambiance devient solennelle, et 4 mecs en costar enfilent des gants blancs et se positionnent autour d’un truc recouvert d’un grand drap: une sorte de boite, de 1m60 de long et 50cm de large.

Oh purée.
Un cercueil ?
Et puis, vu la taille, ça ne peut être qu’un gamin là dedans !
… bordel, qu’est-ce que je fous là ?

Le visage grave, et avec des gestes d’une extrême lenteur, les quatre mecs en blanc soulèvent le drap, le plient puis s’écartent pour révéler… la table avec le matos pour la communion. De là où je suis, ça ressemble à des assiettes à escargot en or, avec un petit truc dans chaque alvéole. Chaque fidèle prend un truc dans le plateau et retourne à sa place. Quand un plateau arrive enfin au balcon, je commence par refuser, mais l’objet est trop rigolo, et j’en prends un (et puis merde, j’ai raqué 20 balles, j’ai droit à un petit souvenir)

Journaux

En attendant le métro, je lis le 20minutes local. Quelques titres attirent mon attention:

Controversy arises as women’s shelter is set to be built next to playground on upper west side

Child injured by stray bullet during early-morning drive-by shooting » … Pas de doute, je suis bien aux états unis.

C’est bon, je ne me suis pas trompé de pays, je suis bien aux USA

Musées

Bronx museum of art

Sympa, mais un peu stérilisé par le style « MoMA ». L’artiste exposé a commencé sa carrière au PS1, un « espace alternatif » du MoMA. J’espérais quelque chose de plus dépaysant. Il y a une expo sur le hip-hop, qui me fout le cafard: cette culture hyper vibrante et dynamique devient d’une tristesse infinie quand elle est exposée dans un musée: Quelques visiteurs marchent doucement en regardant attentivement les murs décorés de faux tags, un DJ set au milieu de la pièce est désespérément silencieux, pendant que des disques de hip-hop passent en boucle sur le système-son du musée. Quand une sous culture rentre au musée, c’est pas la consécration mais le début du déclin.

National History Museum

Certaines parties on un peu vieilli, comme les lapins empaillés dont les yeux blancs coulent hors de leur orbite. Il y a des dioramas qui montrent des animaux « dans leur habitat naturel », légèrement creepy mais plutôt cool au final.

Panpan a pas la forme

Gros point positif : la muséographie donne à voir l’évolution de la science et les incertitudes qui persistent. Par exemple, pour l’évolution du cheval, il y a une ligne de squelettes qui représente l’évolution de l’espèce telle qu’on la connaissait jusqu’à récemment, et derrière, d’autres squelettes découverts depuis, qui compliquent un peu ce tracé simpliste. À de nombreux endroits, on nous explique qu’on sait pas encore la réponse à certaines questions, les hypothèses, et ce qui permettrait de les confirmer ou non.

Dans les couloirs, une petite expo de photos des missions Apollo, que j’avais jamais vues. Certaines sont magnifiques.

MET

Belle expo qui met en parallèle des objets d’Égypte ancienne et d’Afrique subsaharienne. Certains objets sont à couper le souffle, notamment une statue de visage dont il ne reste que les lèvres et le menton, sculpté dans une sorte de marbre orange, et d’une finesse stupéfiante.

C’est dans ce musée que je me rends compte que les américains avaient plusieurs techniques pour faire l’expérience des merveilles du monde depuis chez eux, avant l’invention de la VR:

  1. Faire une image (nul! C’est tout plat, pas immersif du tout)
  2. Peindre un panorama à 360 degrés sur les murs d’une salle circulaire (mieux!)
  3. Faire une copie du bidule en carton-pâte, ajouter quelques plantes en pot (on s’y croirait presque!)
  4. Démonter le truc, le foutre sur un bateau, et le ramener à la maison (Là on y est!)

MoMA

Gros mélange entre des choses très chouettes, et d’autres qui donnent un sentiment de foutage de gueule sans vergogne

oui Refik Anadol, c’est de toi que je parle

Pas mal oeuvres vues en histoire de l’Art, ça fait bizarre : « ah tiens, c’est là que c’est, ça. Bon. » Je suis un peu fatigué, c’est ultra grand et on est pas tellement pris par la main (j’aime mieux le Guggenheim, où l’architecture force l’expo à avoir un ordre défini, et on te raconte une histoire). Je redécouvre Henri Rousseau, qui mérite vraiment à être vu en vrai.

Metlife

Pendant que j’observe un tableau, je remarque un garde qui m’observe bizarrement. Je détourne le regard, en me demandant ce qu’il peut bien avoir à me reprocher : Je suis loin du tableau, j’ai pris une douche et je me suis brossé les dents… Après un moment de suspense intolérable, il s’approche de moi et me murmure à l’oreille : “Rammstein ?”. C’était jour de lessive, mon dernier T-Shirt propre était celui que j’avais acheté à Lyon, à un de leurs concerts. Du coup, on se met à causer Rammstein, au milieu des Kandinsky, Warhol, et autres Lichtenstein. Il m’apprend que Metallica joue le jour suivant à New York, et Il reste des places pas trop chères. Je change mon billet de train et achète ma place : Une occasion comme ça, ça ne se rate pas !

Dans le bus qui m’amène au Metlife Stadium, je cause avec Dave, qui a l’air de bien connaître : il m’explique toutes les petites astuces (il est très fier de sa technique pour entrer avec son cocktail, planqué dans une gourde à eau), et me fait l’audioguide sur le trajet. Un des points d’intérêt majeur dans le coin semble être un centre commercial (le plus gros du pays, ou quelque chose comme ça). Dave est portier : avec 4 collègues, il poireaute 24/7 devant un immeuble, et ouvre la porte quand quelqu’un arrive et porte les sacs, y compris pendant les vacances et que tout le monde est à l’autre bout du monde. Pendant ce temps, le bus se paume, fait demi-tour 3 fois, et après une demi-heure à tourner en rond autour du stade, le chauffeur ouvre les portes et nous demande d’y aller à pied.

Curiosité

Tailgating: Les pick-ups servent de base pour barbecues et autres festivités, avec chaises longues réparties sur le parking derrière. Les gens arrivent plus tôt pour profiter du soleil et du bon air.

En se rapprochant du stade, on croise quelques employés de la sécurité du stade, et l’un d’eux attire particulièrement l’attention : il est armé avec un gros bidule façon militaire, ce qui semble lui donner plus de mérite que les autres, parce qu’une bonne partie du public le remercie, commente son outil ou lui fait un fist-bump en passant. Après s’être quasiment fait racheter ses pompes par le guichetier du vestiaire, Dave m’accompagne jusqu’à ma place, tout en haut du stade.

Le concert est chouette, mais le son n’est pas génial, donc je me fais surtout plaisir sur les chansons que je connais bien. En plus j’ai laissé mes boules Quies dans mon sac au vestiaire, snif. Un groupe de jeunes spectateurs bien marrants et ultra-motivés font les chauffeurs de foule un peu plus bas sur les gradins.

Pour le retour, les départs de bus sont à l’extrême opposé du parking. Tellement loin que quand j’ai demandé mon chemin j’étais persuadé que le mec se trompait : On ne voyait aucun piéton ni aucun bus dans cette direction. À mon avis, ils étaient cachés par la courbure de la terre. Une fois sur place, il faut encore marcher 2km, pour aller au bout de la file d’attente… Ce pays n’aime décidément pas les non-motorisés.

Fil à Delphie

À l’auberge, je rencontre un espagnol, prof de programmation qui veut se reconvertir dans l’AI. Une brésilienne et un nigérian nous rejoignent, puis un médecin canadien et une prof de lettres Irlandaise. La discussion dure des heures, sur des sujets comme les systèmes de santé de nos pays respectifs, problèmes éthiques de l’AI, Blockchain, Game of thrones, etc…

Après quelques parties de billard puis on va diner et boire up coup. Pour le diner, on teste la spécialité locale: le Cheesesteak. C’est aussi appétissant que le nom suggère. Pour terminer en beauté, je me laisse convaincre de re-goûter la Guinness, et c’est toujours aussi dégeu. L’Espagnol a l’alcohol heureux, et devient de plus en plus confiant sur ses opinions politiques: Liberté d’expression absolue, sans aucune restriction; fuck copyright; etc…

En faisant ma popote pour le train du lendemain dans la super cuisine de l’auberge (la meilleure que j’aie jamais vu), on sympathise avec deux ukrainiens en se foutant de la gueule des Américains, qui foutraient jamais les pieds dans une cuisine. Ils sont chauffeurs de camion: 12h par jour, dont 11 de conduite et 1 pour faire le plein et les checks avant le départ)… vive la France et les Syndicats!

Je dis au revoir à un Français que j’avais rencontré au billard, et une nana se jette sur moi: “Ah t’est français toi aussi ?!”. Elle vit à Angoulême, était animatrice, mais c’est trop de boulot, donc maintenant elle fait de l’illustration porno sur commande. Et la communication du député LFI d’Angoulême.

Train to Chicago

Dans le wagon-bar, je rencontre Rose, qui va voir son fils dans le Kansas, depuis New York. Au total, 3 jours de voyage au lieu de 2h en avion, parce qu’elle flippe trop. En me voyant m’enfourner une tartine beurre+cheddar à la suite d’un grosse part de quiche, elle me félicite de manger sain… C’est vrai que l’entrée c’était des tomates-cerises, et le dessert sera une pomme.

En cherchant ce que je vais faire a Chicago, je découvre qu’une adaptation du roman “to kill a mockingbird” sera jouée pendant que j’y serais. To kill a mockingbird… L’un des trois livres que j’ai pris avec moi pour le voyage. Je me donne comme mission de lire un maximum avant la représentation. Ça tombe bien, je suis dans un train, y’a pas grand chose d’autre à faire.

Chique ago

Arrivé à l’hôtel vers 12:00, je déjeune rapidement, fais une petite sieste, et pars explorer la ville. En sortant du métro, il pleut des cordes et je suis pris d’une énorme envie de ne rien faire. Retour à l’hôtel, et une nouvelle petite sieste, sans réveil cette fois. Je dors 11 heures, et me réveille à 2h du matin.

Posé sur un banc dans le parc à côté de l’Art Institute of Chicago pour bouffer mon sandouiche en attendant ma visite guidée, le mec à côté de moi me demande si je suis aussi en pause Dej (cool, je passe pour un local !). Il s’appelle Mike et bosse au musée comme technicien: c’est lui qui déplace et nettoie les oeuvres. Il habite à Chicago depuis toujours, mais a pas mal voyagé, notamment à Grand Canyon. Il me dit que c’est “truly grand”, mais qu’il faut faire gaffe: il a cru y crever. Il recommande aussi beaucoup Yosemite, sa version du paradis sur terre. Quand il était plus jeune, il a voyagé pendant 6 mois dans les US, en logeant dans les hostels et en bivouac, donc il connait pas mal de trucs.

La visite guidée est sympa mais on reste sur sa faim: on s’arrête devant 5 objets au total. Dans une salle pleine d’objets du moyen âge, la guide mentionne la musique qui y est diffusée: c’est une reconstitution de la musique de l’époque, créée par un certain Jordi Savall. Je met un moment à me rappeler pourquoi je connais ce nom…

On termine la visite avec une recommandation pour l’exposition “Remedios Varo”. Je connaissais pas, et c’est très cool: textures étranges, grâce à des techniques de peinture perso, détails fins grattés dans la peinture, plein d’humour et de poésie.

To kill a mockingbird

Dans le théâtre, je suis placé tout en haut, sous les bouches de clim qui déversent leur air glacé sur les spectateurs. Les connaisseurs enfilent pulls et manteaux avant d’entrer. La lumière s’éteint, le rideau se lève, la pièce commence.

Quand le personnage principal (gentil) entre en scène, un tonnerre d’applaudissements l’accueille, comme si on voulait le féliciter d’être si gentil. Je trouve les personnages moins attachants que dans le livre (dont je suis maintenant devenu fan), et quelques choix d’adaptation sont étranges, mais bon, on passe un bon moment quand même.

Pendant les saluts, rebelote: les gentils sont nettement plus applaudis que les méchants (qui ont pourtant très bien joué). Manifestement, ici on applaudit les personnages, pas les acteurs.

Musée des sciences et de l’industrie

Décidément, c’est grand cette ville: Entre mon hôtel (pas loin du centre-ville) et le musée, y’a 15km de petites rues, grands échangeurs, et autres autoroutes, dont on profite pendant 2h depuis le bus coincé dans des embouteillages interminables.

Le musée est immense: À l’étage principal, dans la moitié gauche, on peut voir un Boeing 727, une grosse locomotive à vapeur, avec trois ou quatre prédécesseures (dont “the rocket”), une vingtaine de voitures (dont des modernes, prêtées par de généreux sponsors constructeurs automobiles), une dizaine de wagons de trains, etc… et rien de tout ça ne semble à l’étroit.

Par contre, côté éducation, c’est décevant. Il y a plein de trucs rigolos mais les explications sont souvent hyper basiques. Pour la loco à vapeur, on peut lire:

  1. le chauffeur met du charbon
  2. ça fait du feu
  3. l’eau est chauffée
  4. la vapeur fait tourner les roues

Pour les voitures électriques, c’est:

  1. À la place du réservoir, on met une batterie (oui, comme dans ton tel)
  2. À la place du moteur, on met des moteurs électriques
  3. Du coup, zéro émissions
  4. La planète est sauvée
  5. Youkaidi Youkaida, faites l’amour pas la guerre

J’aime ce qui se passe, mais on est d’accord que ça reste entre nous. Non, parce-que sorti de son contexte, un doigt dans les fesses euh … les gens vont se faire des idées

Tout ça avec des néons bleu futuristes et le logo de la marque partout.

Cachée dans un des escaliers du musée, une collection d’objets très cool: plein d’engrenages et de mécanismes à formes étranges, qui transforment le mouvement rotatif d’une manivelle en pendulaire, linéaire, sinusoidal, etc… C’est hyper agréable de pouvoir contrôler le truc directement, sans électronique ni moteur interposé. Plus bas, on trouve aussi une série de jolies maquettes, actionnables par air comprimé qui illustrent l’évolution des machines à vapeur.

Expo sur le plastique dans les océans. Mise en scène spectaculaire. Dans une salle, un écran incurvé occupe le plafond et l’un des murs, le reste est recouvert de miroirs. Dans une autre, c’est une expérience immersive: des écrans tout autour, et des projecteurs vidéo qui détectent où se trouvent les visiteurs pour projeter des trucs à leurs pieds (des poissons, des oiseaux ou du plastique selon les cas…). Du coup, tu as en permanence un truc qui te balance de la lumière dans les yeux, et tu ne peux y échapper qu’en bougeant en permanence. En résumé: Il y a beaucoup de plastique, les tortues se prennent la tête dans les bidules à bière, et vous en avez même probablement déjà mangé un peu !!! Tout ça est accompagné de jolies visualisations en nuages de particules et de musique triste. Caché à la toute fin de l’expo, à la toute fin d’un bidule interactif interminable sur comment se passer de pailles jetables, un élément propose timidement de “considérer de voter pour des gens qui se préoccupent du problème”. Böööff.

En sortant, je décide de tester “voicemap”, une app d’audioguides racontés par des locaux. Il y en a un pas loin du musée, et le commentaire laissé par un utilisateur a fini de me convaincre:

Vos opinions politiques sont honteuses, et vous êtes un traître à votre pays. Merci

Justin Dzubinski, Voicemap user

On passe devant divers bâtiments et monuments avec un commentaire critique (très soft) sur le contexte de chacun: la chapelle Rockefeller est très jolie, et a permis de blanchir l’image du grand patron après qu’il ait ordonné de tirer sur des grévistes. Le site de la première expérience de réaction nucléaire contrôlée est décrit comme ayant permis l’énergie nucléaire, mais aussi la Bombe. Le tour se termine devant une maison cachée derrière une rangée d’arbres: C’est la maison des Obama…
Bon, ben ils m’ont pas invité pour la soupe, je vais pas rester là.

Pour le retour à la maison, ce coup ci je fais gaffe: pas de bus, métro uniquement. La station est coincée au milieu d’une 2×6 voies, d’où on profite vraiment bien des gaz d’échappements

Bird sanctuary

Le lac n’est pas loin de mon hôtel, mais il y a un obstacle. Une énorme voie rapide sépare la ville de son lac. Toutes les 5 minutes, les piétons ont 20 secondes pour traverser vite-vite les 6 voies, avant que le flot de voitures, qui n’ont pas que ça à faire, ne redémarre. Une fois de l’autre côté c’est plutôt sympa: Un immense parc borde le lac sur toute la hauteur de la ville, et on peut s’y déplacer à pied, à vélo, en roller, etc… Le Bird Sanctuary est un petit parc dans le parc, et m’a été recommandé par Mike (du banc de l’art institute), car apparemment y’a plein d’oiseaux dont des trucs un peu exotiques. Les exotiques ne devaient pas aimer la pluie, parce-que je n’ai vu que des sortes de moineaux.

Par contre, la vue sur le centre-ville est plutôt cool

À la caisse de Trader Joe’s

En rentrant je passe à Trader Joe’s pour faire quelques courses. Pendant qu’elle sort les articles de mon sac, la caissière entame la conversation:

– Alors, comment ça va aujourd’hui ?
– Oh ben je suis en vacances, alors c’est cool !
– En vacances ? Trop bien ! vous avez vu quoi de ma belle ville ?
– Des musées, le lac, downtown, … toussa quoi. Pourquoi, vous avez des recommendations ?
– Et comment!

Elle s’arrête de passer les articles, trouve un papier et un crayon et me fait une liste interminable de trucs à faire, pendant que les clients suivants se répartissent sur d’autres caisses. Quand elle arrive à bout du papier, elle note son numéro et me dit de l’appeler si j’ai besoin d’autres conseils.

Le soir, j’avais l’intention de danser un peu. Cette meuf est marrante et semble avoir une énergie infinie, donc je lui propose de me rejoindre. Elle accepte, et on se retrouve dans une rue que j’avais repéré plus tôt, mais comme c’est sa ville, je la laisse choisir où aller. Elle choisit un bar entièrement vide et silencieux, où on se pose pour boire une bière et discuter. C’est pas vraiment la soirée que j’envisageais, mais c’est sympa quand même. J’en apprends plus sur elle: elle a fait de la radio, du cinéma, et plein d’autres trucs. Et en ce moment, elle est caissière, le temps de trouver une autre activité. Apparemment, Trader Joe’s est plutôt cool, et elle a de la chance d’avoir été sélectionnée (je crois qu’ils ne prennent que des artistes ou quelque chose comme ça)

On sort du bar et on continue de causer en marchant. À un moment dans la conversation, elle parle de son ex-boyfriend, et me demande si j’ai une girlfriend. Comme j’ai juste envie de me faire une pote et pas tellement envie qu’elle se fasse des idées, je dis que oui (← ceci est un vilain mensonge). La conversation continue, jusqu’à ce qu’on arrive devant chez elle. J’accepte de monter “pour boire un cidre”, parce-que je me dis que ça sera marrant de voir comment c’est un vrai appartement normal à Chicago.

Le hall d’immeuble de Lise. C’est un ancien hotel de luxe, qui a un sacré cachet “shining”, je trouve.

On termine donc la soirée au cidre, calés dans son canapé, à regarder des clips de musique sur son ordi ou jouer au ukulélé. Je repars vers 3h.

Dernière soirée à Chicago

Il me manque quelques courses pour mes 30h de train du lendemain, donc je passe à Trader Joe’s pour faire le plein. En plus ça me permettra de dire au revoir et merci à Lise. Je lui raconte ma journée où j’ai suivi ses conseils touristiques: Vélo le long du lac (sous l’orage) puis café en haut de la tour machin, pour admirer la vue (l’intérieur du nuage)

Le soir j’ai prévu d’aller tester un restaurant dont elle m’avait parlé.

– Oah non, c’est pas la peine d’aller jusque là bas pour ça. [bip !]
– Ah ?
– Non. Tu sais quoi ? [bip !] On va faire un truc ensemble. Ça te dis un ciné ? Je t’emmène dans le meilleur cinéma de chicago [bip !]
– Euh. cool !
[bip !]
– Cool, à ce soir!

Nous voilà donc dans un joli cinéma de Chicago, déco à l’ancienne, pour voir un film français. C’est l’histoire d’un petit couple parfait, avec une histoire de tromperie quand une femme débarque là dedans, puis tentative de rabibochage, trouple, puis séparation définitive et le mec se barre avec la nana. Le tout assaisonné de scènes de cul ultra longues et explicites, avec les préliminaires, les différentes positions, l’orgasme, etc… Vu que j’ai quand même un peu l’impression qu’elle flirte avec moi, je me demande si le choix du film est tout à fait innocent.

Elle me ramène chez moi en voiture, et avant que je descende, elle sort de son sac une sorte de gant de toilette multicolore en laine qu’elle avait commencé à tricoter pour moi quand on était chez elle, et qu’elle avait terminé entre-temps.

hem…

MCA Chicago

Boarf. L’expo principale c’est “public enemy”: l’artiste explique qu’il a pas peur de dire les choses comme elles sont, comme par exemple: “le racisme c’est vraiment pas très bien. Et puis tant pis s’il y en a que ça fâche”. Il a une technique de peinture un peu marrante: il peint un motif sur un mur puis brouille avec la main, pour donner une impression de mouvement. Mais il s’en sert dans absolument toutes ses oeuvres, et ça devient lassant.

Dernier repas avant le train: la fameuse deep-dish pizza, spécialité culinaire de Chicago.

Train vers Denver

Colle aux radeaux springs

Douche-Mobile

Je passe à l’Aéroport de Denver pour récupérer ma voiture de location. La meuf au guichet m’annonce avec un grand sourire qu’on m’a “surclassé” vers une “vraie voiture”. Je me retrouve donc avec un énorme veau, impossible à faire démarrer sans cramer un ou deux litres d’essence, dont le joli coffre joliment profilé ne permet pas de stocker un vélo, même démonté … bref, c’est de la merde (de luxe). Elle est d’un blanc immaculé, ce qui me donne un air de gros péteux, mais pour le soleil c’est pas mal. Je vais la surnommer la “Douche Mobile”

Visitors center

Une fois à Colorado Springs, pour me renseigner sur les randonnées du coin, les permis, les méchantes bébêtes, et tout ça, je me rends au “visitors center”. Là je suis accueilli par une gentille dame qui n’a manifestement vu personne depuis l’invention d’internet. Je lui explique ce que je veux faire: randonnée, montagne, ballade, nature, toussa toussa.

“oh oui bien sûr, quelle bonne idée, laissez moi vous trouver une carte”. Elle revient avec une carte du centre-ville, et me détaille toutes les rues où je vais trouver des restaurants, des boutiques, des casinos, et toutes sortes de choses rigolotes, en surlignant tout à coups de Stabylo et en se barbouillant généreusement les doigts d’encre fluo.

Après une bonne demi-heure d’explications, le flot ralentit. Je remercie chaleureusement la dame de ses précieux conseils, avant de prendre congé, 2kg de prospectus sous le bras.

Les zongles, ça pousse plus vite que je pensais… Il va falloir que je trouve un coupong.

Arrivé à l’auberge, je rencontre Jason qui est en train de préparer une douzaine de burritos. Ses gestes sont précis, il a l’air de savoir ce qu’il fait. On commence à causer un peu, mais je suis crevé, je vais dormir un peu. Le lendemain, on fait un apéro dans la chambre avec lui et un autre mec. On parle de plein de choses, lui est là pour travailler et prendre du temps loin de sa famille, avec qui c’est compliqué en ce moment, et il m’apprend qu’il est “convicted felon”. J’essaie d’en savoir plus, mais la conversation dévie rapidement sur un autre sujet. Je me dis qu’il doit pas avoir envie d’en parler.

C’est la première fois que je dors dans un motel-de-jeunesse.

Dome rock trail

Ma première rando aux zuèsse! Au parking du trail head, il y a un park ranger qui poireaute dans son pick up géant. Je vais à sa rencontre pour lui poser des questions, parce que je sais toujours pas par quelle bébête je vais me faire bouffer dans leur jungle, moi. C’est un petit mec trapu, en short et la tronche entièrement blanche de crème solaire. On discute 2 minutes, et il m’explique qu’il y a rien de particulier. Sauf, en haut de la rando, des saloperies de mouches noires salement agressives et qui font bien mal. Ah et aussi des cougars. Mais bon ils ne sont agressifs que quand il y a des bébé, et la saison des bébés est presque terminée. (Ah, ben si la saison est presque terminée, ça va alors)

Après la rando, je continue un peu sur la route jusqu’à “cripple creek”, une petite ville minière restée dans son jus, avec ses bâtiments en briques oranges, sa petite église en haut de la colline, ses maisons en bois, et quelques chiens qui aboient au loin, le tout surplombé par le squelette de la montagne voisine, entièrement scalpée pour son or.

Jason trail

Le lendemain matin, après un réveil plutôt tardif, je me pose dans la salle commune avec ma carte topographique pour chercher quelle rando faire ce jour là. Jason débarque pour prendre son petit déjeuner, et je lui propose de se joindre à moi pour se balader dans la montagne. À ma grande surprise, il est enthousiaste: il doit juste faire quelques trucs à faire avant de partir, donc on va pas faire une giga-rando, mais c’est pas grave, ça me fait plaisir d’avoir un compagnon de marche. Comme l’heure du déj se rapproche, on va déjeuner rapidement à l’auberge avant de partir. Il a un menu en tête, donc je le laisse faire et je fais assistant cuistot.

Il nous prépare des burritos (sortis de sa réserve) agrémentés d’une petite salade de tomates & coriandre, tranches d’avocat et champis sautés au persil-beurre. Je suis bien tombé: Il est chef cuistot (ou cuistot tout court, selon les opportunités). Par exemple la veille, il a bossé toute la journée pour un hotel de luxe dans la montagne. Il me montre une super technique pour aiguiser et affûter les couteaux avec le dos d’une assiette en céramique, ça marche hyper bien !

On commence la rando dans un paysage déjà superbe, mais au bout d’à peine quelques minutes il ralentit. Il a l’air d’avoir un truc qui le gêne à la cheville. On repart, et quelques mètres plus loin, ça recommence. Il lève son pantalon pour révéler … son bracelet électronique ! Tout d’un coup, petite frayeur: On discutait tout à l’heure du réseau de téléphone très imprévisible dans le coin. Si le bidule ne peut pas se connecter au réseau, est-ce qu’il sera considéré comme fugitif ? À la réflexion, c’est plutôt par satellite, donc non, pas de souci.

Rassurés, on reprend notre chemin et la conversation de la veille: comment s’est il retrouvé dans cette situation ? Après une séparation difficile, la mère de sa fille menace de la garder à 100%, et il répond avec des menaces de mort. Comme il dit, faut être con. Il semble sincèrement regretter, et pas seulement de s’être fait choper.

La rando est très chouette, difficile en haut avec une grosse pente faite de fins gravillons. La descente est sacrément casse-gueule mais on s’en sort sans gros bobo.

Train vers Cent Francs Cisco

Posé dans le wagon-bar avec mon guide, mes crayons et mes cartes, je lis et gribouille pour trouver le chemin idéal parmi les merveilles de l’ouest américain. À force mes voisines et mon jeune voisin de table commencent à s’intéresser (c’est un peu fait pour, j’avoue…). Coup de bol, ils ont beaucoup voyagé et connaissent la majorité des parcs. La table se transforme en QG de guerre, tous les quatre penchés sur la carte, évaluant les différentes options et stratégies. Je suis obligé de freiner un peu parce que si je vais voir tous les incontournables dont elles me parlent, il me faudra encore trois mois de vacances.

Pendant ce temps, on a droit à un chouette commentaire du chef de bord, qui nous explique le paysage, la faune, la flore, et plein de détails sur notre voie de chemin de fer. C’est plein d’humour, instructif, et toujours bref.

On longe le Colorado qui serpente au fond d’un très joli petit canyon (à moins que ça soit le joli canyon qui serpente autour du Colorado ?). La rivière est blindée de monde: kayaks, paddles, bouées, barques, rafts, ou baignoires… tout est bon pour se foutre à la flotte. Manifestement, on est leur divertissement autant qu’ils sont le nôtre: les plus polis soulèvent leur chapeau et nous saluent avec un grand sourire, d’autres font de grands coucous à coups de rame, les plus téméraires se retournent, baissent leur froc et se tapent le cul, puis se cassent la gueule. Ca a l’air d’être une tradition ici, parce que on se fait “moon” par des centaines de personnes, pendant plus d’une heure. Comme je suis à l’arrière du train, je peux entendre quand il y en a un qui arrive, grâce à la clameur de ceux de devant, qui se rapproche à la vitesse du train.

Une hôtesse passe pour prendre les réservations pour le wagon-restaurant. C’est bien cher, et à une heure pas chrétienne, mais je finis par dire oui: Une occasion comme ça, c’est pas tous les jours. À 5h30, je me rends donc au wagon restaurant, où je complète une table de trois: le pôpa, la môman et le fiston. On discute un peu, puis on passe commande, mais au moment de choisir le vin j’ai l’air d’un con: Ils savent déjà que je suis français, et pas la moindre idée… je bluffe et choisis un rouge au hasard. La discussion continue, et j’apprends qu’elle est assistante de direction d’Amtrack, la SNCF des états unis. Je pose plein de questions, sur les transports états-zuniens, en faisant gaffe de pas faire de bourde. À la fin du repas, elle tient à remercier personnellement chaque membre de l’équipage au nom du président, qui est pas là mais qui adore ce que vous faites, sisi je vous assure.

Retour à ma place, lecture du routard mais envie de dodo (levé 4h, moi fatigue). J’ai fini par trouver une bonne position pour dormir sur ces sièges: la tête sur l’appuie-jambes et les jambes pliées sur le siège d’à côté, ou alors étendues à la verticale, contre le dossier. Si on est téméraire, on peut même étendre les jambes à travers le couloir et poser les pieds sur l’accoudoir du siège d’en face. Là c’est le bonheur, mais il faut prier pour que la matrone du wagon ne passe pas par là: sa méthode favorite, c’est de t’engueuler d’une voix tonitruante, en te braquant sa Maglite™ dans la tronche.

Dans la matinée, au milieu de nulle part, le train freine très fort, jusqu’à s’arrêter. Avant même que les rideaux aient fini de s’agiter, le chef de bord prend son micro pour nous expliquer la situation: “an air hose popped out [sic]”. On a donc droit à un petit arrêt en plein désert, le temps qu’ils reconnectent le machin et fassent un petit tour de vérification du train. Ça serait chouette si la SNCF s’inspirait d’eux pour la transparence et la rapidité de l’info (pas pour la ponctualité, par contre)

Arrêt “fresh air & smoke” à Reno, eh ben Reno c’est pas beau… ça me rappelle le début de half life 2.

En approchant de San Francisco, le contrôleur passe dans le wagon et parle avec certains passagers. Apparemment, une grosse tempête sévit sur la côte, ce qui fout en l’air certaines correspondances. Heureusement, pour SFC, c’est tout bon: on arrivera comme prévu avec 6h de retard.

Cent Francs Cisco

Me voilà donc à Sans Francisco un dimanche soir, sous une pluie fine et en pleine nuit, donc sans transports. Heureusement mon hôtel n’est qu’à 30 minutes. Je dépose mes affaires et puis il faut que j’aille aux urgences de l’hôpital: J’ai un truc dégeu qui se développe à droite de mes lèvres et le mec de mon assurance m’a conseillé de faire ça. J’ai sacrément la flemme, mais quand faut y aller, faut y aller…

Sur le chemin, je chope un truc à bouffer. Ça coûte quelque chose comme $7.94, je donne $20, la caissière me rend $10 puis me regarde d’un air vide pendant que je me demande si elle va me filer le reste. J’ai pas envie de me battre, ni qu’elle crache dans mon sandouiche, donc je ferme ma gueule

Les rues sont franchement crades. Ça sent la pisse et la merde, je croise une centaine de sans-abris, dont beaucoup handicapés et la plupart semblent être dans un coma profond, dormant dans des positions improbables. Ça fait de la peine de voir ça…

Les urgences sont vides. Je me présente au guichet et explique ma situation. Comme c’est moi qui dois payer de ma poche (mon assurance me remboursera sur facture), la dame m’annonce le tarif: 2000 boules juste pour être vu, et s’il y a des choses à faire, évidemment ça sera plus. Devant ma mine décontenancée, elle m’explique gentiment comment ça marche. il y a trois systèmes:

  • Le médecin normal: par trop cher, mais il fait prendre rendez-vous 6 mois avant
  • Les centres urgent care: un peu plus cher, pas besoin de rendez-vous, mais seulement ouvert pendant les heures de bureau
  • Les urgences: la peau du cul, mais ouvert 24/24

J’irai donc le lendemain au urgent care: Ça fait plusieurs jours que j’ai ce truc, ça va pas être la mort d’attendre encore quelques heures. Conclusion: c’était juste un bouton de fièvre!

L’hôtel est un bon exemple de l’adage “you get what you pay for”: Une odeur de friture lourde plane en permanence sur la cuisine, dont toutes les surfaces sont recouvertes d’une fine couche graisseuse. Ma chambre schlingue si fort que c’est palpable, mais heureusement l’odeur semble flotter dans le haut de la pièce, et je suis sur un des lits du bas. Plus tard, j’apprendrais que c’était pas la chambre mais un de mes colocataires qui émettait l’odeur: Dès son départ, l’air a immédiatement perdu une bonne partie de son épaisseur. En revanche, les douches sont très propres et modernes, ça fait du bien!

Le lendemain, après ma visite au Urgent Care, je vais chez REI, magasin de sport et équipements de rando, où je passe une bonne partie de l’après midi à choisir ce dont j’ai besoin: tente, sac de couchage, matelas, réchaud, etc… J’ai lu tous les conseils des rangers pour les randonnées dans la grosse chaleur, et ils m’ont un peu fait flipper. Je prends donc de la bonne came, très légère et donc bien reuch: tente 1 personne, sac de couchage en plumes de canard (ce truc est magique), suppléments d’électrolytes, popote en titane, etc…

test de tente dans ma chambre

Petite virée au supermarché pour choper des provisions, puis dodo tôt, car je veux partir de bonne heure le lendemain, pour avoir du temps à Yosemite. Vers 4h du matin, une des colocataires entre dans la chambre, le téléphone à l’oreille, au milieu d’une conversation manifestement passionnante, entrecoupée d’éclats de rire tonitruants. Après une dizaine de minutes, il raccroche, mais l’un de ceux qu’il a réveillés n’a manifestement plus sommeil, et ils se tapent la discute, à haute voix. Au bout d’un quart d’heure, comme ça n’a pas l’air de s’arrêter, je lance un timide “guys, it’s 4am”. Ça grommelle un peu, mais ça finit par se calmer.

Réveil tôt, la tête dans le fion car mal dormi, direction l’aéroport pour récupérer ma voiture de location. Avec un grand sourire, la nana m’annonce que j’ai été surclassé. Chouette… J’ai le choix entre une décapotable de sport et une douchemobile numéro deux. Je choisis de rester dans mes petites habitudes (consommer moins de 15 litres aux cent). Après inspection, je prends la route en direction de Yosemite au volant de ma douchemobile #2 noire (plus discret, mais moins bien pour le soleil…)

Yo Sémite Tea

Arrivé au Yosemite visitor center, au fond de la vallée, avec une très belle vue sur Dome rock et la grande cascade. Je demande des tips pour les randonnées et trucs à voir, on me recommande le coucher de soleil à glacier point (accessible en voiture) par contre pour les randonnées, faut voir avec le backcountry office. Après tout ce que j’ai lu, j’ai un peu peur qu’ils soient hyper chiants et procéduriers (genre: “ah ben non, fallait vous y prendre avant, cassez vous” ou alors “comment, n’avez pas de flapensburgats™, et vous osez vous présenter devant nous ??”) Mais en fait, ils sont hyper cools, ont plein d’anecdotes sur la plupart des randonnées, chacun a sa préférée pour des raisons différentes… J’adore. Sans trop y croire, je demande si je peux camper quelque part (tous les campings sont blindés, j’ai nulle part où dormir), mais à nouveau, c’est très facile. Je découvre le concept de “dispersed camping”. Tant que tu as ton permis, que tu est dans la wilderness area (~ 2km de la route), pas trop proche du trail, ni d’autres gens qui campent, tu peux poser ta tente où tu veux. Je loue mon Bear Cannister, un bidon en plastique très solide (et lourd), à ouvrir avec une pièce de monnaie ou un tournevis, dans lequel il faut stocker toute la bouffe, le dentifrice, le parfum, et tout ce qui pourrait plaire aux ours.

Mon plan est donc simple: aller voir le coucher de soleil à Glacier Point, puis mini-rando pour aller trouver un endroit où dormir, et le lendemain départ tôt pour faire la route vers Zion park (c’est très loin). À glacier point, point de vue imprenable sur Yosemite valley, dome rock, la cascade, et tout… C’est superbe, mais accessible en voiture, donc blindé de monde. Dans un coin moins fréquenté, dans une petite cahute, il y a une expo qui explique la géologie du lieu. Ce qui est marrant, c’est qu’il y a pas besoin de photos dans l’expo: tu lis une explication et pour voir de quoi il s’agit, il suffit de se retourner.

Finalement j’attends pas le coucher de soleil total, pour espérer avoir un peu de lumière pour établir mon campement (surtout que c’est la première fois que j’utilise cette tente). Je vide toutes les provisions du coffre de la voiture pour les mettre soit dans la bear canister (que j’emporte dans mon sac), ou dans les “bear box” du parking. Rien ne peut rester dans la voiture, les ours arrachent les portes.

Jolie rando dans les bois, avec les couleurs du soleil tombant. Tombant vite, d’ailleurs, le soleil, tiens… Je me retrouve bientôt dans le noir, avec une lune plutôt timide. Chaque buisson de la taille d’une petite voiture se transforme en ours potentiel, et je commence à flipper un peu. J’ai même quelques gouttes de sueur, alors qu’il fait franchement pas chaud, et je m’arrête toutes les cinq minutes pour voir si le buisson devant moi va se mettre à bouger.

Je trouve le site de campement parfait: grande surface horizontale, avec un sol sablonneux légèrement compacté dans lequel les sardines rentrent comme dans du beurre, mais restent bien stables. On se croirait au camping! Dîner de nouilles ramen, puis vite au dodo, parce que je commence sérieusement à me les peler.

Une fois emballé dans mon sac de couchage, je reconsidère mes plans: c’est un peu bête de faire autant de route pour rester si peu de temps à chaque endroit. En plus, je n’arrive pas à joindre le backcountry office du grand canyon. leur site dit qu’on a une chance d’avoir un permis en se pointant en personne là bas et en attendant trois jours. Du coup, gros changement de plan: Le lendemain, je continue ma rando pour profiter un peu de Yosemite, puis je partirai directement vers Grand Canyon, et on oublie Bryce canyon et Zion Park.

Le lendemain, je continue donc la rando que j’avais commencé. Sur le chemin, je me fait dépasser par des mules. Ça ressemble à un cheval, mais en nettement moins sympathique (ou alors elles sont pas très bien traitées, je sais pas). Je croise plein de plantes et animaux bizarres, notamment une souche d’arbre entourée des restes de l’arbre, sous forme de milliers de petits morceaux de bois presque cubiques, de la taille d’un dé à jouer. Il y a aussi un insecte, que j’avais déjà vu à Colorado Springs, qui vole de façon totalement erratique, et qui émet régulièrement un son de claquement très sec et très fort, qui correspond à chaque fois à un changement de trajectoire.

La rando se termine sur un joli lac de montagne, où je déjeune et fais une petite sieste

Dans une petite descente, je regarde mes pieds pour pas me casser la gueule, et quand je les relève, je vois un ours qui marche sur le chemin devant moi, à une trentaine de mètres. Manifestement il ne m’a pas repéré, ce qui est étrange, parce que je suis pas exactement discret: le gravier et les brindilles croustillent sous mes pieds et ma réserve d’eau bloubloutte dans mon sac… C’est limite si je suis pas en train de siffloter. Mais l’ours est dur d’oreille et n’entend rien. Il continue à déambuler mollement sur le sentier. Quand une randonneuse arrive sur le chemin de l’autre côté, en face de lui, et elle s’arrête immédiatement, mais il lui faut encore quelques secondes pour la repérer. Il s’enfuit alors mollement dans la forêt, comme si sa maman lui avait appris il y a des année que c’est ça qu’il fallait faire, mais qu’il n’était plus totalement convaincu de l’utilité de la manœuvre.

Excellent travail de cadrage… Je suis prêt pour le National Geographic

Route vers le Grand Canyon

En théorie, je peux y être demain avant la fermeture du backcountry office, mais ça va être chaud… Rien que pour sortir de Yosemite, il faut 2 heures. Après être monté et descendu trois montagnes, on finit par sortir du parc, et on arrive sur une grosse interstate confortable, avec un traffic assez dense mais finalement plutôt rassurant. Sauf que le GPS a une autre idée en tête: après quelques kilomètres, il m’indique de prendre à gauche, sur une petite route qui s’enfonce à perte de vue dans le désert. C’est la bonne direction, j’ai 10L d’eau dans le coffre, de la bouffe et de quoi dormir… Ça va aller.

Je roule vite (110km/h, la limite autorisée) pour avoir un max marge pour les imprévus et pour pouvoir dormir un peu. La route est belle, parfaitement droite dans le désert, encadrée de montagnes, des trucs qui ressemblent à des vaches paissent sur la végétation aride du désert, en mode hyper-extensif: elles semblent pas avoir le même instinct grégaire que chez nous (probablement le manque de bouffe). La nuit est tombée, mais je dois rouler encore un moment. La route étant parfaitement droite, je peux voir les phares de la prochaine voiture 20 minutes avant de la croiser. Par contre, elle est pas plate: de temps en temps, le bitume se met à onduler de plusieurs mètres verticalement, ce qui est assez terrifiant quand ça arrive juste au moment de croiser l’autre voiture et qu’elle disparaît intégralement dans la vague suivante.

Je commence à fatiguer sérieusement, avec en plus un brin de déprime: j’aurais aimé trouver des compagnons de road trip à San Francisco, là je me sens con, tout seul dans ma grosse voiture de luxe. Le téléphone ne capte pas, pas plus que la radio, les podcasts que j’avais téléchargés commencent à m’emmerder… Il faut que je dorme. L’avantage avec ce genre de route, c’est que c’est facile de s’arrêter: le bas côté est large, et il n’y a personne. Je m’écarte le plus possible de la route et m’arrête. Je vais dormir dans la voiture, pour pouvoir repartir vite le matin. J’ouvre les portes pour avoir de l’air et de la place pour les jambes, ce que n’apprécie pas du tout la douche-mobile qui me le fait savoir en bipant et clignotant tout ce qu’elle peut biper et clignoter. Mais je suis plus têtu qu’elle et elle finit par se fatiguer. J’ai la tête dehors, ce qui me permet d’observer les étoiles, et la lumière anti-collision de la tour télécom dans le champ d’à côté. Tout ça est très serein, ça fait du bien.

Je repars à 7h, ce qui me donne théoriquement 2h de marge pour arriver avant la fermeture (sans pauses), mais sur un trajet aussi long, c’est pas grand chose… Je m’arrête devant un panneau qui dit “pilot car in use, wait here”. Rapidement, un camion plein de panneaux arrive en face. Chouette, ça doit être la voiture pilote! mais il passe sans ralentir, et s’arrête 200 mètres plus loin.

J’attends une dizaine de minutes, avant de me décider à aller demander au mec du camion ce qu’il se passe. “ah ben non, vous pouvez y aller, ils bossent pas aujourd’hui”. Cool… Il a dû penser que je m’étais arrêté au panneau pour regarder le paysage. Plus loin, rebelote, mais cette fois il y a du monde devant, et ça a l’air d’être pour de vrai. Effectivement, 30 minutes (!) plus tard, une camionnette avec un panneau “pilot car, do not pass” apparaît sur la route, suivie d’une trentaine de voitures et camions. Misère… J’espère qu’il y en aura pas d’autres, ma marge commence à être maigre.

Je roule sans arrêt, sauf pour faire le plein et acheter mon déjeuner: un paquet de chips, posé sur le siège passager. Avec quelques embouteillages, j’arrive finalement au backcountry office du Grand Canyon, 30 minutes avant la fermeture.

Grande Canne à Ions

Au backcountry office, personne devant moi, je vais directement au guichet et explique ce que je veux faire, en m’attendant à devoir négocier. J’ai préparé plein d’arguments: C’est mon anniversaire, c’est probablement la dernière fois que je viens dans cette région du monde, j’ai lu et compris tous les conseils des rangers, etc… Mais en fait, comme à Yosemite, c’est plus facile que prévu:

– cool, vous voulez partir quand ?
– Euh, le plus tôt possible, sauf ce soir, faut que je dorme
– Okay, alors demain ?
– Euuh… cool!
– okay, j’imprime ça … voilà, un petit tampon ici [toc], et vous signez là.

En fait, j’ai du bol: C’est pas la bonne saison, donc y’a pas grand monde qui s’aventure au fond du canyon, mais grâce à la tempête sur la côte, les températures sont descendues à un niveau raisonnable: il fait à peine 38 degrés en bas !

Je pose un tas de questions bêtes. J’ai peur de les emmerder, mais ils sont ravis de causer. En plus, j’ai bien révisé, et ils sont contents de voir que quelqu’un s’est donné la peine de lire leurs conseils. L’une d’eux est Française, arrivée petite avec ses parents, amoureuse des parcs, elle est jamais repartie et est ranger depuis 10 ans.

Je ressors de là avec mon permis sous le bras, le sourire jusqu’aux oreilles et envie de chialer de joie: Je vais descendre dans le Grand Canyon ! Bon, la fatigue joue peut être un peu, mais quand même, c’est trop cool.

Pour la nuit, le Ranger ma conseillé de simplement sortir du parc, et de trouver un coin pas loin dans la forêt: “je le fais tout le temps, c’est super pratique”. Je me trouve un bon spot, un peu à l’écart de la route, mais pas trop loin. Ce soir aussi, je vais dormir dans la voiture: c’est moins confortable, mais je pourrai partir plus vite le matin pour choper la navette qui part à 8h, et que j’ai pas tellement envie de la rater.

Du coup, il me reste juste à prendre une douche et à préparer la bouffe pour mes trois jours de rando. J’ai quelques repas lyophilisé, mais je me suis dit que ça serait sympa d’avoir quelques trucs plus “frais”. Pour le menu, je me suis inspiré de Jason: je vais faire des burritos. Je sors donc le matériel: réchaud, casserole, boites de conserve, riz, fromage, poivrons, lampe frontale … lampe frontale ? Merde, qu’est-ce que j’en ai foutu ? dans la boite à gants ? non. Dans le porte-gobelets ? non. Sous la roue de secours ? non. Dans la poche de mon pull ? non… dans la boite à gants ? non, j’ai déjà vérifié. Je finis par vider toutes la voiture comme un forcené, sans succès.

Je me retrouve donc à apprendre à rouler des burritos à la lumière de la lune, avec des haricots noirs sortis de leur boite à coups de pierre, parce que j’ai pas d’ouvre boite non plus. Pas un instant je ne pense à utiliser les phares de la voiture pour m’éclairer.

Navette ridge to ridge

Dans la navette qui m’amène de l’autre côté du canyon (5h de route), je rencontre John & Dave, deux potes, qui ont l’air très enthousiastes, et posent plein de questions au chauffeur. Moi j’hésite à me cacher les yeux, pour avoir la surprise quand je commencerai la rando, mais la tentation est trop forte. Ils avaient prévu d’aller randonner dans les montagnes vers San Francisco, mais ont dû changer leurs plans à la dernière minute à cause de la tempête. Ils sont cool, donc je propose de rester ensemble pour la rando.

Sur le bord de la route, il y a plein de “native markets”, avec des cahutes totalement délabrées. La plupart sont abandonnées, celles qui restent vendent des “bijoux natifs”, des légumes ou des vieux lave-linges déglingués. Ça fait de la peine à voir.

Après un dernier passage aux toilettes, et ajustement des niveaux d’eau, on est prêts à partir quand on croise un bénévole du PSAR: Preventative Search and Rescue. Ils passent leur temps dans le premier mile des chemins de randonnée et parlent aux gens, pour s’assurer qu’ils savent ce qu’ils font, qu’ils ont de l’eau, etc… Depuis que le programme existe, les vraies opérations de SAR on énormément diminué. Au milieu de la conversation, le mec me demande si je suis un buveur de scotch. Je me demande si c’est la barbe qui me donne une tête d’alcolo, mais c’est juste mon chapeau, que j’avais trouvé à Chicago qui est en fait une pub pour une marque de Scotch. À partir de ce moment, je suis rebaptisé “Scotch”.

Il nous prévient qu’il va y avoir pas mal d’activité dans le ciel cet après midi: une dame s’est cassée la gueule de la falaise. Heureusement, elle est pas tombée très loin, et c’est une opération de sauvetage, pas de ramassage.

Jouons un peu: Sauras-tu trouver la dame dans cette photo ?

Descente vers cottonwood

On est pas fâchés d’entamer notre descente: il fait 11 degrés et on commence à se les cailler. On s’enfonce dans les couches géologiques de toutes les couleurs, textures et même odeurs (certaines me rappellent celle d’une église à la fin d’une chaude journée d’été), certaines font quelques centimètres d’épaisseur, d’autres plusieurs dizaines de mètres. La végétation évolue avec l’altitude: on commence par une forêt de sapins, et on terminera avec un champ de cactus.

À chaque virage, on découvre un monde nouveau, et une foule de nouvelles questions de présente: comment ce bloc s’est il retrouvé là ? comment cette couche peut elle avoir cette inclinaison mais pas celle du dessous ? Ce qui est cool, c’est que John est scientifique, et donc c’est facile de se lancer tous les deux dans des discussions de ce genre, où chacun émet des hypothèses ou les réfute. c’est très rigolo.

Dave, lui, est expert en bières et alcools variés. Du coup il nous fait un petit cours improvisé sue les alcohols qu’on peut tirer des plantes qu’on voit autour de nous. L’une d’entre elles a un cycle de vie plutôt étrange: Toute sa vie (une dizaines d’années), elle fait grandir ses feuilles grasses, et à la toute fin, elle suce l’énergie hors de ses feuilles pour faire pousser une gigantesque tige, au bout de laquelle se trouvent ses graines.

Il se trouve que John est aussi le frère de d’une ranger, donc il connait plein de trucs rigolos ou utiles. Par exemple, il y a une ligne de téléphone historique qui traverse le canyon, que sa sœur est en train de démonter, parce que ça fout la merde avec les hélicos. Pour contrôler sa température, il recommande de se baigner, entièrement habillé aussi souvent que nécessaire. Pour dormir à la belle étoile peinard, il suffit d’utiliser les tables disposées dans chaque camp: elles sont solides, et ça permet de s’éloigner d’une bonne partie des bestioles gourmandes.

À un moment le chemin, habituellement très bien entretenu et facile, devient franchement douteux: à peu près totalement effondré, avec une sorte de cascade qui sors du flanc un peu en contrebas, et une bonne chute en perspective si on se loupe. Ça ne dure que quelques mètres mais Dave est pas rassuré du tout. On finit par réussir à le convaincre et à l’aider à traverser, John devant et moi derrière. En réalité, c’est pas une cascade, mais le trans-canyon pipeline qui a éclaté: En temps normal, l’eau est captée à roaring springs, puis menée via une conduite forcée qui descend au fond du canyon et remonte de l’autre côté, jusqu’à une station de pompage qui finit de la remonter jusqu’au village. C’est ce pipeline qui alimente en eau douce le grand canyon village, et les points d’eau le long de la randonnée. Heureusement qu’il y a des rivières un peu partout et que j’ai une grande réserve d’eau… Le village a quelques centaines de mètres cubes de réserve, mais il y a quand même urgence, et on aura droit à un nouveau ballet d’hélicoptères pour amener le matériel et les gens pour faire une réparation vite-fait.

Au premier campement, à mi descente, il fait chaud donc je dors tente ouverte, avec vue sur le ciel étoilé et les falaises. C’est superbe…

Le lendemain, pour le petit déjeuner, j’ai un truc spécial rando lyophilisé: 500 calories en 5 minutes. C’est dégeu mais ça va me tenir la journée…

Ribbon Falls

John nous annonce le point fort de la journée: les ribbon falls. Au bout de quelques heures de marche, il nous pointe du doigt un petit pipi qui tombe de la falaise, à environ 1 km de notre chemin, et nous annonce fièrement les fameuses chutes. Je veux pas le froisser, mais franchement ça a pas l’air si bien que ça. En plus, un peu plus loin un panneau nous annonce que le pont qui devait nous y amener a été emporté par la précédente crue. Qu’à cela ne tienne, on va passer par la rivière… On commence à longer la rivière, puis à un endroit moins profond, on traverse, pour se retrouver au milieu de plantes aquatiques, en pataugeant dans un mélange de flotte et de vase jusqu’en haut des cuisses. On se croirait être des GIs au Vietnam (sans Viêt Cong, c’est plus confortable). C’est rigolo, mais Dave et moi on commence vraiment à se demander si c’est vraiment la peine de faire tout ça pour aller voir cette petite cascade toute nulle.

Après le dernier virage, on débarque sur un spectacle absolument magique: Dans une quasi-grotte, une cascade à deux étages tombe d’abord depuis la falaise sur une sorte de promontoire recouvert de mousse et, de là, continue sa chute en une série de fins filets d’eau, et termine sa course dans un petit bassin. Sur le côté, là où il n’y a pas assez de débit pour créer des filets, l’eau descend en milliers de gouttelettes scintillantes qui perlent en s’accrochant à la mousse. John nous explique qu’il s’agit du lieu le plus sacré des Zuni (l’une des tribus natives qui vivaient dans le canyon dans le passé), et on comprend très bien pourquoi. Ils auraient pu demander que l’accès aux chutes soit interdit, mais ils acceptent de garder l’accès ouvert, à condition qu’on respecte le lieu. Heureusement, se baigner dans le bassin n’est pas blasphématoire, et on s’y prélasse jusqu’à avoir presque froid.

Chiotte, je pensais que ce stylo me tiendrait largement jusqu’à la fin… J’avais un paquet de 6, et j’ai refilé les 5 autres à un de mes colocataires de San Francisco. Bon, ben c’est pas grave, je vais terminer au porte-mine.

Route to phantom ranch

Sur le chemin, on croise un rattlesnake, qui n’a pas l’air d’avoir envie qu’on lui fasse des bisous. Apparemment, le “rattle”, c’est des petits os qui se baladent librement dans la poche au bout de sa queue. Il a foutu la trouille à Dave, qui a fait un bond d’un mètre sur le côté avant de sortir son appareil pour tenter de lui tirer le portrait

On croise régulièrement des gens qui vont nettement plus vite que nous. La plupart ont un sac très léger, avec juste de l’eau et un peu de bouffe, et font le rim-to-rim dans la journée. On en croise même un, totalement exténué, qui trimbale sa tente et tout le reste, pour faire le rim2rim dans la journée, dormir au nord, puis faire le retour le lendemain. Le pire, c’est un mec qui fait, l’aller-retour dans la journée, en footing (70km et 3500m de dénivelé positif et négatif, quand même). À force de croiser tous ces gens, je me dis que j’aurais pu aussi faire en une journée, mais finalement je suis content d’avoir le temps de profiter: Je suis sûr qu’ils peuvent pas aller voir les ribbon falls. Et je suis pas là pour faire un exploit sportif, de toute façon.

On arrive à Phantom ranch, une sorte de mini village calé au fond du canyon. On y trouve la cantina, qui rassemble un stand de limonade fraîche, un bureau de poste (par mule), et on peut même y dîner façon cantine, en réservant 6 mois en avance. Sur la petite place ombragée devant la Cantina, on trouve un point d’eau, qui est désormais directement relié à la rivière, et dont l’eau doit donc être traitée. À cet effet, un bidon de javel est disposé à proximité, accompagné d’instructions sur comment ne pas s’empoisonner.

Anecdote sur les toilettes-compost: Ça a beau composter tout ce qu’on veut, à un moment le volume ne réduit plus, et il faut les vider. Il y a donc un métier qui consiste à se rendre dans tous les toilettes du parc, faire le ménage de la cabine, triturer le compost, et le préparer pour hélitreuillage (!) quand c’est plein. Ce métier, qui a pas l’air tellement glamour est en fait l’un postes les plus demandés dans le parc: C’est à ce poste qu’on passe le plus de temps à se balader sur tous les sentiers de rando et profiter de la nature. Même les rangers n’en font pas autant.

Pendant qu’on boit notre limonade, une ranger vient nous proposer d’assister à un petit cours sur la géologie du canyon. John et Dave sont fatigués et déclinent mais ça m’intéresse et j’accepte. Une table est disposée contre le tronc d’un arbre dont les branches forment un grand parasol, qui protège les bancs disposés en plusieurs demi cercles autour. La ranger commence par expliquer que la biologie c’est pas son truc — Ah ben merde alors — et qu’elle préfère parler à des gens. Du coup, son concept c’est de nous faire écouter des interviews de diverses personnes qui répondent à la question: “quelle est votre couche géologique favorite” … Pourquoi pas, mais le résultat est pas super intéressant. Dommage.

Je rejoins John & Dave au campement, un peu plus loin (sur le chemin, je manque de me faire bouffer par une mule, salbêtes). Notre emplacement est juste à côté de la rivière, donc baignade (habillé, toujours) puis opération filtrage, pour refaire nos stocks d’eau. On enchaîne avec le diner, quelques parties Yahtzee que je perds lamentablement malgré mon statut de débutant, puis gateau d’anniversaire, avec les bougies et tout.

Simultanément le pire et le meilleur gateau d’anniversaire que j’aie jamais eu.

Je fais mes adieux à John & Dave, qui restent un jour de plus au fond du canyon et prépare mes affaires pour le lendemain. Pour pouvoir partir tôt et éviter la grosse chaleur prévue demain (43 degrés), je dors à la belle étoile, sur la table. Le ciel est superbe, et je dors hyper bien mais pas longtemps. À 4:30 je rassemble mes affaires et commence à marcher en bouffant mon petit déjeuner lyophilisé à 500 calories. Dans la pénombre, j’aperçois sur le pont derrière moi au moins 2 silhouettes de ce que je pense être des pumas: forme de chat, longue queue fine, hauts d’environ un mètre, avec des mouvements très élégants, lents et contrôlés. Je reste un moment à les observer, mais heureusement eux ne s’intéressent pas à moi.

En traversant le pont qui enjambe le Colorado je comprends pourquoi il est déconseillé de s’y baigner: à cet endroit, le fleuve a du caractère: des pierres affleurantes un peu partout, il coule très vite, et me rappelle un peu la Loire. Dans la lumière de la pré-aube, le paysage est totalement lunaire. Mais le jour se lève vite, et révèle petit à petit une vaste palette de couleurs.


C’est rigolo, plus je monte (en me rapprochant du village, donc), plus je croise des gens avec du matériel sophistiqué: des chaussures amorties, ombrelles auto-portées, filtres à air tour-de-cou sur batterie, etc… Tout en haut, il y a aussi pas mal de gens “casual”, en jean et T-shirt, sans même une bouteille d’eau.

La fin de la rando est quand même salement raide, et je gravis la dernière marche avec un mélange de soulagement et de mélancolie que ça soit déjà fini.

Je passe au backcountry office pour les remercier et déposer une paire de lunettes que j’avais trouvées à une rest-house, puis je prends la route en direction de Los Angeles, avec un détour par Las Vegas. J’ai aucun plan pour dormir, mais c’est pas grave, au pire je pioncerai dans ma caisse n’importe où à Vegas.

Route to vegas

J’ai fini par mettre la clim, car mon tel (qui me sert de GPS) surchauffe et s’éteint toujours au pire moment. Du coup, il fait à peine 30 degrés dans la voiture, et je dois bien avouer que… c’est assez confortable.

En passant au hoover dam, n’étant plus spécialement pressé, je sors de l’autoroute, et passe le contrôle de sécurité pour aller au parking du point d’observation:

– Vous avez des armes ?
– Non
– Vous avez un drone ?
– Euh … non
– OK c’est bon, allez-y

En ouvrant la porte, je suis accueilli par une bourrasque d’air brûlant et humide. J’ai l’impression d’avoir ouvert la porte du four et mis la tête dedans. Je passe aux toilettes (sèches), où le vent bouillant vient te chatouiller les bijoux de famille… C’est une sensation très étrange. Il fait vraiment une chaleur intenable, je vais pas rester longtemps. Le hoover dam, c’est grand, c’est haut, et le niveau d’eau est étonnamment bas. Voilà, retour à la clim !

Sur le chemin, je scrute les routes secondaires et le désert, pour voir s’il sera facile de trouver un lieu pour dormir. La réponse est non: toute la partie naturelle du désert est encadrée par un grillage, sans aucune interruption sur des centaines de km, et le bord de la route est impraticable.

Après une dernière côte, Las Vegas apparaît toute scintillante devant moi. Alors que j’essaie d’identifier les quelques casinos que je connais, un avion de chasse arrive de la gauche, et me fait un superbe virage sur l’aile, incliné à 90 degrés, pile poil au dessus de la route, juste devant moi. 2 autres le suivent et effectuent la même manœuvre. Ils ont dû être prévenus de mon arrivée, et voulu célébrer à leur façon…

Lasse Végasse

Je trouve le parking gratuit du “treasure island”, indiqué par le routard, et rentre dans le casino. Ça clignote de toutes les couleurs et dans toutes les directions, des centaines de machines à sous, de roulettes virtuelles, et stands de paris sportifs s’étendent à perte de vue. Un peu plus loin, des salons de paris sportifs, encadrés d’écrans géants qui diffusent une dizaine de chaines en même temps accueillent les parieurs plus sérieux. J’ai la tête qui tourne…

Je finis par trouver une zone avec des vrais croupiers qui gèrent des tables de craps, blackjack et roulette. Je m’arrête d’abord à la roulette où un tenancier, à l’air parfaitement lugubre, lance la bille et distribue les gains sans laisser paraître la moindre émotion autre qu’un ennui profond. Incrusté dans la table, de son côté, il y a une sorte d’entonnoir, où il fait glisser les mises perdues qui s’engouffrent dans le néant. Il doit bien y avoir quelques milliers de dollars qui disparaissent là dedans à chaque tour, c’est fascinant à regarder.

Je passe ensuite à une table de blackjack, où je passe un moment à admirer les gestes nonchalants mais précis du croupier. J’essaie en vain de comprendre les règles, avant de repérer une table où il n’y a personne et la croupière a l’air de s’emmerder ferme. Je lui demande si elle peut m’expliquer les règle. Avec un grand sourire, elle m’envoie chier et me recommande d’aller voir à une autre table comment ça marche. Bon, eh ben je jouerai pas au blackjack, na.

Après avoir demandé trois fois mon chemin, je finis par trouver la sortie, et je me promène sur le strip pour aller voir quelques autres casinos. Objectif: le Bellagio, parce que c’est le seul que je connaisse un peu (probablement grâce aux films ocean’s 13). Sur le chemin, je passe par le Venetian, avec ses reproductions en carton-pâte du palais des doges de la place saint marc et même un canal aromatisé au chlore, sur lequel voguent des gondoles chargées de touristes, sous un plafond qui tente tant bien que mal d’imiter le ciel bleu. Je passe ensuite devant le Cesar’s Palace, immense complexe hôtelier et casino qui s’étend sur plusieurs blocs. J’irai bien faire un tour, mais il est de l’autre côté du strip, et j’ai la flemme d’aller jusqu’à une passerelle pour traverser l’infernale 2×3 voies qui nous sépare. Ensuite, passage obligé au “Paris” et sa fausse tour Eiffel, ses faux cafés, sa fausse boulangerie, etc… Le faux plafond bleu ciel est plus haut que celui du Venitian, mais mal éclairé et il y a des trous. C’est totalement déprimant, on se croirait dans le Truman show.

Devant le Bellagio, il y a un grand spectacle lumière + fontaine + musique. Curieusement, comparé à tout le reste, c’est apaisant, délicat … presque subtil. En entrant, mon plan est simple: acheter 4 jetons, en jouer 2 à la roulette, et garder les 2 autres en souvenir. Premier problème, on ne peut acheter les jetons qu’avec du cash, et j’ai laissé le mien dans la voiture (malin, d’aller à Vegas sans thunes…) Pas grave, il y a des ATM un peu partout. Les montants proposés ne sont pas les mêmes que d’habitude: de $500 à $5000, et la commission est de $10. J’arrive quand même à saisir un montant à la main, $20. Muni de mon billet de $20, je me rends fièrement à la table de roulette la plus proche pour acheter mes jetons et jouer. La croupière me regarde comme si j’étais clodo: c’est $25 minimum. Après une petite séance de zyeux tristes de chat potté, elle finit par accepter de me laisser jouer avec mes pauvres $20, et me file 4 jetons de 5. Je m’installe à la table, et place avec assurance un jeton sur la case “rouge”. Cette fois ci, la croupière me regarde comme si j’étais débile profond. “Il faut tout jouer d’un coup”. Ah ben oui mais non, eh! et mes jetons souvenir, alors ? Je prends congé, et passe à la caisse pour rendre 2 jetons et récupérer 10 balles.

Je ressors de là un peu dégoûté: il faut quand même que je joue une fois… De retour dans mon casino-parking, je trouve un stand de roulette automatique. C’est moins bien que la vraie, mais au moins y’a pas de minimum. Je glisse mes 10 balles dans la machine, et mise 3 sur “rouge”. la balle est lancée, les jeux sont faits, elle fait quelques tours, ralentit, sautille, puis finit par s’arrêter sur .. une case rouge!!!! Bravo bravo bravo! J’ai gagné ! lancez les confettis ! Bon. et maintenant, comment je fais pour sortir mes sous de la machine ? Le temps que je comprenne, le truc est reparti, ma mise est toujours au même endroit … merde. La bille tourne, sautille, puis s’arrête … sur une case rouge ! Je gagne encore ! Yeeehaw !!! 6 balles en 5 minutes, je suis super bon à ce jeu! Je crois qu’il faut que je change de métier. Cette fois j’arrive à sortir le ticket pour aller récupérer mes sous à la caisse. Bilan de mon séjour à Vegas: -4$ (en comptant les frais d’ATM). Je trouve ça plutôt honorable.

De retour à la voiture, c’est inenvisageable de dormir sur place: il fait 35 degrés, du bruit et de la musique dans tous les sens, des voitures passent en permanence en faisant tout trembler… je reprends la route jusqu’à une petite station service calme, où je peux m’arrêter.

Au milieu de la nuit, à moitié endormi, j’entrouvre une 3e porte pour avoir un peu plus d’air. La voiture décide que c’est certainement un vilain cambrioleur, et déclenche l’alarme-klaxon. Après 5 minutes à chercher où j’ai caché les clefs, j’arrive à l’éteindre, et tente de me rendormir, avec le cœur qui bat à cent à l’heure.

Write wood

Quand je me réveille le matin il fait déjà chaud. Je commence à en avoir marre. Je profite d’un instant où mon téléphone capte pour trouver une carte des températures de la région, et choisis une nouvelle destination, à l’endroit le plus froid à proximité: Wrightwood. Au village, je fais le plein d’eau, et de provisions, et trouve une carte de la montagne. Il y a un petit lac pas loin, je m’imagine planter ma tente au bord, et nager le matin dans l’eau fraîche. Une fois arrivé au lac, il s’agit en fait d’une petite mare, à l’eau stagnante maronasse et aux bords assez verticaux.

Changement de cap, je continue à monter jusqu’à une petite route en terre qui me mènera à mon spot de bivouac parfait: en haut d’une colline balayée par le vent, un petit bosquet d’arbres protège du soleil une zone presque horizontale, recouverte d’un matelas d’épines de pin. J’ai de l’eau, de la bouffe, il fait frais, la vue est splendide … je vais être bien !

; )

Journée peinarde en haut de ma montagne: réveil tardif, lecture, petit déjeuner, rattrapage du journal de voyage, déjeuner, sieste, etc… J’essaie d’envoyer un message à John: il habite à Los Angeles, et m’a invité à diner chez lui quand j’y serai, mais on a pas de rendez-vous précis. Je pars en mini-randonnée, pour essayer de trouver un endroit avec du réseau, mais rien n’y fait. On verra demain. Petite douche (elle est fraîche, quand même), dîner et dodo. J’ai presque froid, c’est merveilleux.

Josh Hua Tri NP

Le lendemain je lève le camp (15 minutes chrono, je suis pas mécontent) et je redescends de ma montagne pour aller voir Joshua Tree National Park. C’est pas tout près, mais John et Dave me l’ont recommandé. Dès qu’on descend un peu, la température monte en flèche, et à Joshua Tree le climat est vraiment désertique: plus de 40 degrés à l’ombre. Je commence au nord du parc, par une petite ballade pas trop ambitieuse, à cause de la météo, et parce que je me suis éclaté le pied avec une pierre la veille.

Ensuite, je reprends la voiture pour entrer un peu plus loin dans le parc, où je découvre une vallée entière recouverte des fameux Joshua Tree. On dirait un peu le portrait-robot raté d’un arbre normal: un cylindre marron qui sort de la terre à la verticale, d’où sortent d’autres cylindres plus petits, qui se tordent pour aller vers le ciel, et au bout des cylindres, des formes allongées et plates de couleur verte

Après une petite ballade dans une chouette expo en plein air, qui explique les différentes plantes et leurs adaptations au climat local, retour au bercail (parce que moi j’en ai pas, des adaptations au climat). Re-montage de camp — au même endroit, on change pas une équipe qui gagne — en pleine nuit cette fois.

Cet après midi, j’ai un problème: J’ai fini mes bouquins, j’ai rattrapé mon retard sur mon journal … et la vue depuis mon campement est si cool que j’ai du mal à me motiver à aller voir ailleurs. Finalement, je me bouge le cul et j’ai bien fait: en marchant un peu on passe de l’autre côté de la montagne, où il y a une superbe vue sur le désert. Je visite aussi une station de ski en hibernation (éternation ?) En me baladant sur les pistes noire, j’espère trouver divers objets perdus par des skieurs en détresse, mais d’autres ont dû passer avant moi, parce qu’il n’y a rien. En revenant vers mon campement, je constate qu’il n’est vraiment visible depuis aucune route alentour, ce qui n’est pas pour me déplaire, parce que je suis quand même pas totalement certain que c’est autorisé de camper là.

Décidément, mon campement est vraiment bien. Ce que je préfère, c’est le thermostat intégré: quand j’ai un peu chaud, je vais dans la zone vent+soleil; Si j’ai vraiment trop chaud, j’ai la zone vent+ombre; Et quand j’ai froid, en sortant de la douche par exemple, il y a la zone soleil + calme plat. Tout ça dans un rayon de 30 mètres de ma tente…

Brightwood camp

L’eau sans Gelées

Avant toute chose, je veux passer chez REI, car j’ai des problèmes avec quelques articles: Le réchaud pliant est tout coincé, et plus pliant du tout (ça m’arrange un peu de pouvoir le rendre, parce que c’est pas compatible avec les cartouches qu’on peut trouver en Europe). Et le sac de couchage m’a un peu déçu: je m’attendais à un truc vraiment hyper chaud, et j’ai quand même eu froid à Yosemite. En plus, en lisant le ticket pour trouver combien le réchaud m’avait coûté, je me suis aperçu que je l’avais pas payé… Oups.

Frank Lloyd Wright house

Perchée sur l’une des collines de Los Angeles, il y a une maison conçue par Frank Lloyd Wright pour une riche héritière du pétrole, que l’on peut visiter.

Le projet initial était de construire, dans un parc en plein Los Angeles, un complexe comprenant une maison pour la dame et sa fille (c’est celle qu’on visite), une autre pour des invités (chefs d’états, sénateurs, têtes couronnées, etc…), et un théâtre. Madame fait donc appel à Frank Lloyd Wright pour designer le bousin, mais comme il est très occupé par un projet d’hôtel à Tokyo, il ne s’implique pas assez dans le projet. Tout ça finit par gaver madame, qui le fout à la porte et fait terminer la maison par un assistant. Le reste ne sera pas construit.

En entrant par la double porte en béton armé, on est surpris par la fraîcheur: toutes les portes et fenêtres sont ouvertes, mais la température est très agréable. Franky sait s’adapter au climat, on dirait! À l’intérieur, c’est un mélange de bois, béton brut, et quelques autres matériaux, assez chaleureux sans être étouffant.

Pour en apprendre plus, on te file un bouquin de 40 pages, que je trouve vachement bien: il y a plein d’infos, mais on peut aller se poser quelque part pour lire, regarder les plans etc, et se balader ensuite. Il y a plein d’infos sur les différentes restaurations, ce qui est d’origine, simplement de la même époque, ou une copie (y compris les meubles).

Je pose quelques question à une dame du musée, et notamment: est-ce qu’il y a de la clim, ou c’est juste super bien foutu. Non, c’est de la clim. Elle a été installée il y a quelques années, avant ça c’était absolument invivable. Et merde, finalement Franky gère pas tant que ça…

Bon, mais quand même, c’est chouette les pétrodollars!

Observatoire

Je monte en voiture à l’observatoire, mais il y a un monde de malade, impossible de se garer et j’ai la flemme de revenir à pieds. De toute façon, c’est très joli vu d’en bas aussi.

Hollywood

En me baladant dans la ville pour trouver un cadeau pour John — chez qui je suis invité à dîner et dormir — je trouve un point de vue sur le Hollywood sign. C’est hyper loin, donc ont voit que dalle sur la photo, mais c’est pas grave, j’arrangerai ça sur Photoshop.

Sur Hollywood Boulevard, je repère quelques étoiles de personnes que je connais, mais la plupart me sont totalement inconnues. L’une d’entre elles est cachée par une bâche et protégée par des plots de chantier. Je me demande si c’est celle de Trump ?

Chez John

En arrivant chez John, je lui offre la bouteille de Scotch que je lui ai ramené. Heureusement, il comprend la blague, et ça le fait bien marrer (parce que j’ai aucune idée de s’il aime ça. Et moi non plus, soit dit en passant). Je lui refile aussi toutes les provisions que j’ai pas pu faire entrer dans mon sac: oignons, échalotes, miel, tortillas, papier alu, sacs poubelle, sac isotherme, et un abonnement pour un an à tous les parcs nationaux des US (ça c’est parce que ça va me servir à rien, une fois en France).

Je rencontre la famille: Le fiston fait du surf, de la rando et du cross country, la fille pareil, le papa et la maman font de la rando, du monocycle, et de l’ultimate, le chien fait du bruit dès qu’il est seul, et le chat ne fait rien. Ils sont tous hyper sympas, et on dîne en discutant de plein de trucs, pendant que les enfants des voisins tournent autour de la maison en nous espionnant et en essayant de nous faire peur, suivis de leurs parents qui entrent pour les chercher, et taper la causette.

Après le dîner, on va promener le chien (qui n’a toujours pas de nom. J’ai proposé Gérard, Ermantrude ou encore kiki, mais pour l’instant c’est juste “le chien”). En passant devant la voiture, j’ouvre la porte pour récupérer mon pull. Il doit croire que c’est pour l’abandonner sur place, parce qu’il se jette dedans, et refuse absolument de sortir. Il faut qu’on se mette à deux, l’un à pousser, l’autre à tirer pour le sortir de là. Je cours un peu avec lui pour essayer de le fatiguer, histoire de réduire son volume sonore pour la nuit. C’est pas de sa faute, le pauvre: il a été séparé de sa famille récemment, et doit être un peu traumatisé… mais quand même, ça fait mal aux oreilles.

Dans l’avion de retour, je suis au milieu de la rangée du centre, avec des voisins qui aiment beaucoup leur accoudoir, et à nouveau tout le monde qui ferme les volets pour mater des films. Snif.

Je réprime mes pulsions meurtrières et lance un film, moi aussi.